Muksin

Malaisie (2007)

Genre : Comédie dramatique

Écriture cinématographique : Fiction

Collège au cinéma 2011-2012

Synopsis

Orked vit dans une petite ville de Malaisie. C’est une écolière studieuse qui aime lire et préfère les sports de garçons aux occupations des filles. Ses parents, un peu bohèmes, l’élèvent dans une grande liberté et lui transmettent leur goût de la vie et de la culture. Cette famille vit son bonheur au grand jour et se moque des critiques des voisins.

Un été, Orked fait la connaissance de Muksin, un jeune villageois venu passer ses vacances à la ville. Entre les deux enfants se noue une relation tendre et pudique remplie de jeux et de secrets partagés. Les grandes vacances, avec leur temps étiré, laissent à ce premier amour tout le loisir de se déployer sous le regard bienveillant des parents. Mais la fin de l’été arrive. La séparation est inévitable.

Distribution

Orked / Sharifah Aryana Syed Zainal Rashid
Muksin / Mohd. Syafie bin Naswip
Le père / Irwan Iskandar bin Abidin
La mère / Sharifah Aleya Syed Zainal Rashid
Kak Yam / Adibah Noor binti Mohd. Omar
Rafiq Ashidiq bin Adbull Aziz
Muhammad Zaili bin Sulan
Norlela binti Yahmad
Ng. Choo Seong
Sallehuddin bin Abu Bakar
Mislina binti Mustaffa

Générique

Titre original : Mukhsin
Réalisation : Yasmin Ahmad
Scénario : Yasmin Ahmad
Image : Keong Low
Son : Vincent Poon, AddAudio
Montage : Affandi Jamaludin
Directeur artistique : Zaini Abdul Latiff (Ujang)
Musique : Ahmad Hasmin et Inom Yon
Production : Grand Brillance Sdn. Bhd, MHZ Film Production
Producteur : Ahmad Puad Onah
Producteur exécutif : Rosihan Zain Baharudin (Dhojee), Rosnah Kassim
Distribution : Les Films du Préau
Sortie en France : 6 février 2008
Couleurs
Durée : 1h34

Autour du film

Tout en brossant sans pesanteur le tableau des mœurs de la société environnante (le voisin polygame qui méprise la mère de ses enfants, l’opprobre social qui frappe la mère de Muksin, la perdition qui menace son frère aîné), Yasmin Ahmad poursuit le récit bientôt brisé de ce premier amour avec une élégance qui n’évite pas toujours la mièvrerie, mais qui offre aussi des moments de grâce.

Difficile, à ce dernier égard, d’oublier cette admirable scène filmée de l’intérieur de l’appartement des parents d’Orked, où la jeune fille et sa famille écoutent la sublime interprétation de Ne me quitte pas par Nina Simone, tandis qu’à l’extérieur, plongé dans la nuit, le jeune Muksin guette en vain un signe de réconciliation de son aimée. Mais elle le laissera longtemps souffrir, trop longtemps pour éviter les regrets de ne pas l’avoir retenu à temps et de l’avoir laissé partir à tout jamais.

Que le lecteur ne nous tienne pas trop rigueur de révéler ce qui n’est après tout un secret pour personne, que les premières amours ne sont jamais aussi belles et poignantes que parce qu’elles s’embrasent le temps d’un été, en laissant ce goût de cendres qui fait le lit de toutes les conquêtes ultérieures. Tout tient donc à la manière de les convoquer et de les célébrer, celle de Yasmin Ahmad étant en l’occurrence tout à fait recommandable.

Jacques Mandelbaum / Le Monde 6/02/2008

(…)Troisième long métrage de la réalisatrice malaise Yasmin Ahmad, Muksin entremêle le récit de ce premier amour naissant aux récits d’autres amours réels, heureux ou tragiques, libres ou subis. A travers le prisme de l’intime, où se joue la liberté de l’individu, ce film dépeint des relations hommes-femmes altérées par la pesanteur et l’exigence des traditions. Mais c’est en se situant volontairement en marge, en montrant qu’autre chose est possible, qu’il dénonce la cruauté et la brutalité de ce qui existe (humiliation de la polygamie, répudiation et violences physiques).

Ce mouvement du singulier à l’universel traverse le film de part en part. La poésie des situations naît d’un détail, d’une attention, d’un décalage, d’associations inhabituelles, et procure des émotions qui nous permettent de percevoir ce qui ne peut être formulé, ou ce qui n’a pas besoin de l’être. Yasmin Ahmad sait utiliser les silences de ses personnages pour nous donner à voir des sentiments (gros plans sur l’expression d’un visage tandis qu’une autre voix parle ; délicatesse des gestes ; sérénité des paysages).

Le film montre également la poésie et l’universalité d’une culture faite de mélanges inattendus : coexistence des langues (la mère d’Orked, personnage surprenant et drôle, ne parle qu’anglais); éclectisme des musiques et des danses (sur une chanson traditionnelle, la mère entraîne sa fille pour danser sous la pluie, dans une étonnante reprise de Pulp Fiction)… Jusqu’à cette scène où les parents dansent enlacés sur Ne me quitte pas interprété par Nina Simone. Ils invitent leur fille à venir les retrouver. Il fait nuit et tous trois tournent lentement tandis que Muksin les regarde, caché, attendant qu’Orked accepte à nouveau de le voir.

Inspiré d’un poème (First Love, de Wislawa Szymborska), Muksin parvient à nous faire ressentir la douce amertume, sans tristesse, d’un amour dont on se souvient toute sa vie. (…)

Zéro de conduite.net

Vidéos

Naissance d’un souvenir – analyse d’une séquence

Catégorie :

Près de la fin du film, la rupture entre les deux héros devient irrémédiable. Orked reste sourde aux supplications du garçon désespéré et son revirement est trop tardif… C’est avant tout par l’utilisation de l’espace, visuel et sonore, que Yasmin Ahmad opère la transformation de ce qui est vécu sur le moment par les protagonistes comme une tragédie en un souvenir.

Vidéo à voir en liaison avec la rubrique « Analyse d’une séquence » du dossier “Muksin, p. 12-13.


Analyse : Joël MAGNY
Réalisation : Jean-Paul DUPUIS

Le goût du premier amour perdu

Catégorie :

Beaucoup de films ont raconté, avec talent ou mièvrerie, l’histoire d’un premier amour. La grande qualité du film de Yasmin Ahmad tient au fait qu’elle en parle en termes cinématographiques. Muksin est en effet construit sur deux régimes du temps. Celui, angoissé, de la famille de Muksin et des voisines, et celui de la famille d’Orked, où l’on apprend à vivre pleinement et sereinement le moment présent. Ce sont moins les faits rapportés qui importent que leur saveur, le goût qu’ils laisseront. Yasmin Ahmad s’inspire ici, sans l’imiter ou prétendre l’égaler, d’un cinéaste qu’elle admire, le Japonais Yasujiro Ozu, et tout particulièrement son film Le Goût du riz au thé vert (1952, diffusion DVD Carlotta Films).

Cette vidéo peut être regardée en liaison avec la rubrique « Mise en scène et significations » du dossier “Muksin”, p. 7-9.


Analyse : Joël MAGNY
Réalisation : Jean-Paul DUPUIS