Rabi

Burkina Faso, Grande-Bretagne (1992)

Genre : Récit initiatique

Écriture cinématographique : Fiction

École et cinéma 2004-2005

Synopsis

Rabi vit avec sa famille dans un village en brousse. Il joue avec ses copains et aide son père à la forge. Deux rencontres changent sa vie : son père lui demande d’aider Pugsa, vieux sage du village qui va initier le garçon au respect de la liberté de chacun et de la nature. Il lui rapporte aussi une tortue, qui a heurté son vélo. Tout à sa tâche auprès du vieil homme, Rabi lui sert de messager auprès de Tusma, son ancienne amoureuse. Mais le garçon s’occupe surtout de sa tortue, au point de négliger son travail d’apprenti forgeron. Son père s’en irrite, ramène l’animal en brousse. Pugsa, sensible au chagrin de l’enfant, l’emmène chercher une autre tortue, si grosse que Rabi peine à la porter. Il tente d’en faire un animal domestique, lui construit un enclos, la maltraite. Les moqueries de ses amis et un affreux cauchemar rendent la raison à l’enfant qui, au terme d’une longue marche, redonne à la tortue sa liberté, non sans avoir d’abord longuement discuté avec elle. De retour, Rabi organise la rencontre de Pugsa et Tusma. Au village, la vie reprend son cours mais l’enfant et le vieil homme continuent leur dialogue.

Distribution

Rabi
Rabi, dix ans, vit avec sa famille dans un village de pleine brousse au Burkina-Faso. Il partage les jeux et les obligations des garçons de son âge. Son père voudrait lui apprendre son métier de forgeron. Deux rencontres, avec le vieux Pugsa et avec une tortue géante, vont engager l’enfant dans une réflexion, une prise de conscience, sur la liberté, le respect des autres et de lui-même.

Pugsa
Pugsa est un vieux sage à la santé fragile, qui initie Rabi au respect de la vie et l’éveille à celui de la nature. Il chique du tabac, que Rabi va lui acheter chez la vieille Tusma, son ancienne amoureuse dont il rêve encore secrètement.

Générique

Réalisation et scénario : Gaston Kaboré
Image : Jean-Noël Farragut
Musique : René B.Guirma, Wally Badarou
Production : BBC-TVE Londres
Distribution : Les Films du Paradoxe
Durée: 1 h 02
Interprétation :
Rabi / Yacouba Kaboré
Pugsa / Tinfissi Yerbanga
Tusma / Joséphine Kaboré
Le père / Joseph Nikiema
La mère / Colette Kaboré

Autour du film

Le temps et l’invisible
Le travail de scénario et de mise en scène de Gaston Kaboré est d’autant plus remarquable qu’il est comme souterrain, que l’histoire, apparemment limpide, trace donc son chemin, elle aussi, dans l’esprit du spectateur, en même temps que Rabi et Pugsa font le leur. Dans cette chronique où le quotidien se répète de jour en jour, de saison en saison, sans se figer, jamais rien ni personne n’est vraiment pareil à ce qu’il était la veille. Cette lente mutation des choses et des êtres, Gaston Kaboré nous la donne à voir peu à peu, sans gesticulation ou discours superflu, dans une économie d’écriture cinématographique qui va bien au temps qu’il faut à chacun des personnages pour prendre conscience du changement opéré autour de lui-même et en lui-même. Parler d’un temps nécessaire à la transformation des personnages dans un film qui dure à peine plus d’une heure peut paraître surprenant. Mais le rythme crée le temps et Gaston Kaboré ne précipite rien.
Extrait du Point de vue du Cahier de notes sur… écrit par Luce Vigo, édité par Les enfants de cinéma.

Vidéos

Intrusion d’une tortue dans une scène de vie ordinaire. Chacun à sa place.

Catégorie :

par  Luce Vigo

Pistes de travail

  • Le village menacé par la ville
    Toute l’action du film se passe dans le village, ou dans son proche environnement : la brousse ou la grande colline. La ville n’est jamais vue, pourtant elle est présente dans Rabi : les déboiseurs chargent leurs charettes de bois destiné aux besoins de la ville, le père, avec sa bicyclette – la seule, semble-t-il, du village – ou sa femme et sa fille, vont vendre les poteries au marché de la ville. Dans un film précédent, Zan Boko, Gaston Kaboré avait raconté la difficile cohabitation des habitants d’une ville nouvelle et ceux d’un village mitoyen. Dans Rabi, la ville est-elle aussi vécue comme une menace pour les villageois ?
  • Habitat
    Le village est constitué de plusieurs concessions, chacune appartient à une famille et se divise en lieux de sommeil (la case) et lieux de vie et de travail (le hangar, la cour, la forge, etc…). Selon les besoins de l’action, Gaston Kaboré donne à voir l’ensemble d’une concession – celle de la famille de Rabi, du vieux Pugsa, de Tusma la marchande de tabac – en plans larges, ou seulement un de ses éléments, en plans rapprochés, sans jamais oublier que cet habitat est au cœur d’une nature qui procure aux habitants nourriture, travail, rêveries et fantasmes. Il montre aussi, dans plusieurs séquences, la circulation qui se fait d’une concession à l’autre grâce à des chemins, ruelles que l’on ne voit que partiellement, dans la logique du récit.

    Fiche mise à jour le 24 septembre 2004
    Fiche réalisée par Delphine Lizot, d’après le Cahier de notes sur … écrit par Luce Vigo, édité par Les enfants de cinéma

Expériences

A l’origine du film, un concours lancé par plusieurs télévisions européennes, dont la BBC, ayant pour thème l’environnement. Dans un premier temps, Gaston Kaboré servit d’intermédiaire pour faire connaître ce concours auprès des cinéastes africains. Il y eut peu de réponses. Il fut alors, lui-même, sollicité, répondit qu’il n’avait pas d’idée de documentaire sur ce sujet et que celles qu’il pouvait avoir en fiction lui paraissaient très éloignées d’une préoccupation directe de l’environnement. “ Proposez toujours ” lui dit-on. C’est alors qu’il a envoyé aux producteurs “ cette petite histoire de l’intrusion d’une tortue dans une famille paysanne qui allait faire bouger les choses ”.
Rabi est né d’un souvenir d’enfance : vers l’âge de onze ans un cuisinier, dont Gaston Kaboré aimait écouter les histoires, lui fit cadeau d’une tortue. Cet animal symbolise, au Burkina-Faso, la sagesse, l’obstination, la longévité, la fidélité en amitié et représente à la fois le monde animal et le monde minéral.
Le film a été tourné, du 9 septembre au 24 octobre 1991, à trente kilomètres de Ouagadougou, sur la route de Zorgho, dans un village où les habitants sont devenus les figurants du film. Le jeune acteur, malgré son nom -Yacouba Kaboré- n’a aucun lien de parenté avec le cinéaste qui l’a connu quinze jours seulement avant le début du tournage. Joseph Nikiema qui interprète le rôle du père de Rabi a déjà joué dans les autres films de Gaston Kaboré. Si deux tortues “ jouent ” dans le film, une quinzaine d’autres ont été ramassées au cours du tournage. Gaston Kaboré ignorait qu’il y eut autant de tortues dans son pays.

Outils

Bibliographie

La Haute-Volta et le cinéma, Victor Bachy, Editions de l’Harmattan.Collection Cinédia, Cinémas d’Afrique noire, OCIC, 1983.
Dictionnaire du cinéma africain, tome 1, Association des Trois Mondes, Kharthala, ministère de la Coopération et du Développement, 1991.
L’Afrique et le centenaire du cinéma, Fepaci, Présence Africaine, 1995.
Cinémas africains en 1972, Guy Hennebelle (sous la direction de), L’Afrique littéraire et artistique, Société africaine d’édition.
Cinémas noirs d’Afrique, Paulette Ph. Decraene (sous la direction de), L’Afrique littéraire n°68-69, juin 1983.
Black African Cinema, Nwachuwu Frank Ukadike, University of California Press, Berkeley and Los Angeles, California et University of California Press, London, England.
Le Burkina-Faso contemporain, l’expérience d’un autodéveloppement, Helmut Asche, L’Harmattan, Bibliothèque du développement.