Tomboy

France (2010)

Genre : Drame

Écriture cinématographique : Fiction

Collège au cinéma 2012-2013, École et cinéma 2013-2014

Synopsis

Laure a 10 ans. Laure est un garçon manqué. Arrivée dans un nouveau quartier, elle fait croire à Lisa et sa bande qu’elle est un garçon. Action ou vérité ? Action. L’été devient un grand terrain de jeu et Laure devient Michael, un garçon comme les autres suffisamment différent pour attirer l’attention de Lisa qui en tombe amoureuse. Laure profite de sa nouvelle identité comme si la fin de l’été n’allait jamais révéler son troublant secret.

Distribution

Zoé Héran / Laure/ Michaël
Malonn Lévana / Jeanne
Jeanne Disson / Lisa
Sophie Cattani / la mère de Laure et Jeanne
Mathieu Demy / le père de Laure et Jeanne
Yohan Ventre / Vince
Noah Ventre / Noah
Cheyenne Lainé / Cheyenne
Ryan Bonbeleri / Ryan
Christel Baras / la mère de Lisa
Valérie Roucher / la mère de Ryan

Générique

Titre original : Tomboy
Réalisation : Céline Sciamma
Scénario : Céline Sciamma
Image : Crystel Fournier
Son : Benjamin Laurent
Montage : Julien Lacheray
Décors : Thomas Grezaud
Musique : Jean-Baptiste de Laubier
Production : Hold-up Films (Paris)
Producteurs : Bénédicte Couvreur
Sortie en France : 20 avril 2011
Couleurs
Durée : 1h22
Distribution : Pyramide

Autour du film

Tomboy : malentendus identitaire

C’est un enfant de 10 ans, mignon comme tout, à la blondeur de couverture de magazine. Visage androgyne, taches de rousseur, yeux bleus, débardeur immaculé. Il emménage dans une nouvelle cité, sa nouvelle chambre aura des murs bleus, sa petite soeur adore les chatouilles, sa mère est enceinte, son père s’amuse à lui laisser le volant de la voiture. Une famille en or.

La rentrée des classes approche, et pour n’importe quel enfant venant de changer de lieu d’habitation, le déracinement engendre une solitude, une angoisse. Dehors, il fait beau, un groupe de garçons s’amuse. Il est temps de se faire accepter dans le groupe. En bas de l’immeuble, une petite fille lui demande son prénom. « Michaël ».

A vous, lecteurs, qui n’aimez pas qu’on vous dévoile le ressort d’un scénario, il est peut-être temps d’abandonner ici la lecture de cet article sur Tomboy, de Céline Sciamma, bien que son rebondissement soit dévoilé assez tôt. Michaël joue au foot, au jeu du béret, entretient une relation d’attirante amitié avec sa nouvelle amie Lisa. Au fil des minutes, Céline Sciamma nous fait sentir qu’il entretient un secret, mène double vie. Pourquoi cette propension à se scruter dans le miroir, à vérifier qu’il peut se mettre torse nu, à couper des mèches de cheveux qui tendent à masquer son cou et s’amuser à s’en faire des moustaches ?

Le mystère est levé lorsque Michaël sort de la baignoire. Michaël est une fille. Tomboy, récit ludique du désir de travestissement d’un garçon manqué, vire insensiblement au tendre suspense, puis à une discrète réflexion sur l’identité, sur la liberté de se choisir une vie, sur la manière dont les autres vous regardent et qui détermine votre bien-être, vous cloisonne, vous condamne, vous ramène à une normalité.

Obligée de porter une robe

Mine de rien, Tomboy donne à réfléchir sur le droit de tout un chacun à avoir une face occulte, sur l’existence vécue comme dissimulation. Dans un premier temps, non sans une certaine tension, Michaël est seul avec son fantasme, inquiet de devoir aller pisser accroupi dans un bois quand ses camarades de jeux pissent debout, soucieux de se nicher un faux pénis en pâte à modeler dans le slip pour faire illusion lors d’une baignade collective.

Dans un deuxième temps, il est démasqué par sa petite soeur qui accepte de jouer le jeu, trop contente d’avoir un grand frère qui la protège. Dans un troisième temps, après le trouble ressenti en tête à tête avec Lisa qui l’embrasse, et s’amuse à le maquiller comme une fille, viendra l’épreuve. Contraint de dévoiler son sexe, d’avouer son vrai prénom (Laure), de faire amende honorable avec une mère soucieuse de conformisme, Michaël vit un drame personnel, fait d’humiliations.

Par petites touches impressionnistes, un jeu de non-dits qui pousse le spectateur à projeter ces situations d’enfance sur les malentendus, complexes ou calvaires vécus par des adultes, la comédie de Céline Sciamma vire quasiment au drame existentiel. Le détonateur de l’enfermement dont sera victime Laure/Michaël est déclenché par les adultes.

Ici, ce n’est plus un jeu, comme dans le Sylvia Scarlett, de George Cukor (1935), où Katharine Hepburn se déguisait en garçon. L’obligation de porter une robe devant ses camarades vire à la blessure, à l’avilissement. Tomboy est un film sur l’apprentissage de la cruauté, comme l’était son premier opus, Naissance des pieuvres, où une gamine faisait de la natation synchronisée pour être intronisée dans un groupe et approcher une belle blonde, fausse lolita, par désir. Déjà Céline Sciamma déclinait la difficulté pour une fille d’enterrer son soutien-gorge, sondait l’intolérance vis-à-vis de l’homosexualité, ou tout simplement vis-à-vis des protocoles sociaux.

Jean-Luc Douin / Le Monde 20/04/2011

Vidéos

Renaissance de Laure… ou de Michaël ?

Catégorie :

Michaël ou Laure ?…Un film comme “Tomboy” ne pouvait qu’être ambigu ! Presque innocemment, le film de Céline Sciamma raconte un incident de parcours au terme duquel l’héroïne, Laure, subit une double humiliation, en privé et publiquement devant son amie Lise et tous les garçons et filles de la « bande ». Et puis, semble nous dire ironiquement la réalisatrice, tout rentre dans l’ordre. Maman est contente et va pouvoir élever son tout nouveau bébé en paix et en toute bonne conscience. Laure a reconnu sa faute. Elle s’appelle bien Laure, comme tout le monde semble le vouloir, y compris Lise… Renaissance de Laure : Michaël a bel et bien disparu… C’est ce que nous dit la dernière séquence de “Tomboy”… Pourtant… Il suffit d’une image. À peine une image, un photogramme. Le dernier… Et l’on s’interroge… Qui renaît en cet instant ? Laure comme le dit le récit. Ou Michaël comme le suggère ce simple photogramme et le sourire ambigu de Laure-Michaël ?


Analyse : Joël Magny
Réalisation : Jean-Paul Dupuis
Cette vidéo peut être vue en relation avec la rubrique “Analyse d’une séquence”,
p. 14-15 du dossier  » Collège au cinéma » n° 198 de Carole Wrona sur « Tomboy ».

Passages dangereux

Catégorie :

L’adolescence est un « passage ». “Tomboy” semble raconter ce passage : Laure a cru ou rêvé un moment qu’elle pouvait être Michaël… Redeviendra-t-elle la fille que tout le monde veut voir en elle ou quelque chose subsistera-t-il du garçon ? Peu importe la façon dont le spectateur choisira de comprendre le récit, la mise en scène, elle, nous dit sans cesse combien les passages sont importants et combien ils sont aussi nécessaires que dangereux. L’un d’entre eux surtout, autour duquel s’articule la mise en scène de Céline Sciamma, l’entrée-couloir de l’appartement familial qui nous fait parfois songer à des plans d’un cinéaste comme Yasujiro Ozu, entre la banalité et le suspense…


Analyse : Joël Magny
Réalisation : Jean-Paul Dupuis
Cette vidéo peut être vue en relation avec la rubrique “Mise en scène & significations”,
p. 10-13, du dossier « Collège au cinéma » n° 198, de Carole Wrona, sur “Tomboy”

Montrer/cacher

Catégorie :

Les films programmés dans les dispositifs français d’éducation au cinéma (École, Collège, Lycéens et apprentis au cinéma) peuvent aussi être abordés en suivant le fil rouge d’une question de cinéma transversale. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du Cinéma, cent ans de jeunesse où vous trouverez, en plus des ressources générales sur chaque question de cinéma (enjeux, une question/une séquence, extraits de films…) des ressources spécifiques sur les films des dispositifs, sous forme de PDF (liste des films des dispositifs concernés par une question de cinéma, exemples d’analyses, bibliographie).

Ainsi, Tomboy est-il un film exemplaire de la question « Montrer/cacher ».

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