Tous en scène

États-Unis (1953)

Genre : Comédie musicale, Comédie sentimentale

Écriture cinématographique : Fiction

Collège au cinéma 2023-2024

Synopsis

Arrivée de Tony Hunter (Fred Astaire) à New York. Ses amis et paroliers Marton (Oscar Levant et Nanette Fabray) l’accueillent à la gare. Tony les quitte pour faire la tournée de Broadway, il danse et chante avec un cireur de chaussures noir (Leroy Daniels). Les Marton et Tony assistent à la fin d’Œdipe roi, monté et joué par Jeffrey Cordova (Jack Buchanan). Tony finit par se laisser convaincre de jouer dans la nouvelle revue des Marton, que Cordova pense comme un Faust moderne. Cordova engage Paul Byrd (James Mitchell) pour la chorégraphie de la revue et l’amène à proposer sa compagne, la danseuse classique Gabrielle Gérard (Cyd Charisse), comme partenaire de Tony. La première rencontre de Tony et Gabrielle, chez Cordova, après le ballet de Gabrielle, se passe mal : Tony a peur que Gabrielle soit plus grande que lui, Gabrielle est heurtée par l’inspection minutieuse de Tony, qu’il n’explique pas. Les répétitions se passent mal, Tony quitte la revue. Gabrielle est envoyée chez Tony pour lui faire des excuses. Finalement, il s’excuse de ses mauvaises manières. Ils sortent et dansent ensemble dans un parc. Une idylle s’ébauche, sous l’œil jaloux de Paul. La première est un four, le public est rebuté par l’intellectualisme poussé de Cordova. Tony prend la direction de la revue, repensée dans le sens du divertissement et de la gaieté. La première à New York est un triomphe, Gabrielle avoue son amour à Tony devant toute la troupe, à l’issue de la représentation.

Distribution

Fred Astaire : Tony Hunter
Cyd Charisse : Gabrielle Gerard
Oscar Levant : Ted/Lester Marton
Nanette Fabray : Lily Marton
Jack Buchanan : Jeffrey Cordova
James Mitchell : Paul Byrd
Robert Gist : Hal Benton
Lotte Stein

Générique

Réalisateur : Vincente Minnelli
Assistants réalisateurs : Jerry Thorpe, Jack Greenwood
Scénaristes : Betty Comden, Adolph Green
Sociétés de production : MGM – Metro-Goldwyn-Mayer, Loew’s Incorporated
Producteur : Arthur Freed
Producteurs associés : Roger Edens, Bill Ryan
Distributeur d’origine : MGM – Metro-Goldwyn-Mayer France
Directeurs de la photographie : Harry Jackson, George J. Folsey
Cadreur : Robert Bronner
Ingénieur du son : Douglas Shearer
Compositeurs de la musique originale : Adolph Deutsch, Arthur Schwartz « The Egg » / The Girl Hunt »
Compositeurs de la musique préexistante : Arthur Schwartz « Penny Arcade / Dancing in the Dark / Sweet Music », Adolphe Adam « The Beggar’s Waltz (Giselle) »
Auteur des chansons originales : Howard Dietz « That’s Entertainment / Oedipus Bridge »
Auteur des chansons préexistantes : Howard Dietz « By Myself / A Shine on Your Shoes / You and the Night and the Music / Louisiana Hayride / Triplets / I Love Louisa / … »
Compositeur des chansons originales : Arthur Schwartz « That’s Entertainment / Oedipus Bridge »
Compositeur des chansons préexistantes : Arthur Schwartz « By Myself / A Shine on Your Shoes / You and the Night and the Music / Louisiana Hayride / Triplets / I Love Louisa / … »
Chorégraphe : Michael Kidd
Directeurs artistiques : Cedric Gibbons, Preston Ames
Décorateurs : Edwin B. Willis, Keogh Gleason
Costumier : Mary Ann Nyberg
Maquilleur : William Tuttle
Coiffeur : Sydney Guilaroff
Monteurs : Albert Akst, George White
Script : Bill Orr
Régisseur : Hugh Boswell
Coordinateur des effets spéciaux : Warren Newcombe
Conseillers techniques : Henri Jaffa pour le Technicolor, Robert Brower pour le Technicolor

Autour du film

Genèse

Les studios de la 20th Century Fox, propriétaires des droits de la revue éponyme de Broadway, se firent acheter par Freed celui d’utiliser le titre du film The Band Wagon. Pour le rôle de Cordoba, les acteurs Clifton Webb, Vincent Price et Edward G. Robinson sont d’abord pressentis. C’est finalement Jack Buchanan qui est retenu. Les répétitions commencent le 11 août 1952 et ce, pour six semaines. Le tournage débute le 3 septembre 1952. Le partenaire d’Astaire, LeRoy Daniels, pour le numéro se déroulant dans une galerie de machines à sous, était un authentique cireur de chaussures découvert dans une rue de Los Angeles. La machine à sous en forme d’orgue de barbarie, réalisée par Oliver Smith, mobilisa quinze dessinateurs du studio. L’enregistrement musical de The Girl Hunt et le tournage de ce numéro commencèrent respectivement le 9 janvier 1953 et le 12 janvier 1953. Le tournage d’une durée de cinquante-cinq jours fut achevé le 28 janvier 1953.

Le film est produit par Arthur Freed pour la MGM dans la foulée de Chantons sous la pluie. Le couple d’amis scénariste est presque un autoportrait de ceux du film Betty Comden et Adolph Green ; l’aversion d’Astaire pour les partenaires plus grandes que lui était bien réelle ; le personnage de Cordova est largement inspiré de José Ferrer ; The Band Wagon, le titre original, est celui d’une revue créée à Broadway par Astaire et sa sœur Adele en 1931.

La chanson du film, That’s Entertainement!, est devenue emblématique de ce deuxième âge d’or de la comédie musicale, au point de devenir le titre original d’un film d’anthologies du genre, Il était une fois Hollywood sorti en 1974, dont le succès engendra deux suites en 1976 et 1994.

Parmi les séquences les plus remarquables sont souvent cités le « pas de deux » dans le parc d’Astaire et Charisse (Dancing in the Dark), le numéro des triplés (Triplets) et celui d’Astaire dans le parc de jeux (Shine on Your Shoes).

Le film, qui couvre presque deux heures, était initialement plus long. Des numéros furent coupés, notamment celui qui offrait à James Mitchell l’opportunité de danser davantage.

D’après une histoire presque vraie

Deux élements du scénario étaient conformes à la réalité de l’époque, à commencer par le fait que le personnage de Fred Astaire était sur la pente descendante et songeait à prendre sa retraite. Tout ce qui est dit sur le fait que le personnage de Cyd Charisse est plus grand que le sien est également vrai, même si l’actrice ne porte pas de talons hauts lors de leurs scènes communes.

Pistes de travail

Analyse de séquence

Dans ce chef d’œuvre musical de 1953 avec Fred Astaire dans le rôle-titre, New York et sa 42e avenue deviennent un personnage en soi. Cette séquence festive qui met en scène un Tony Hunter (Fred Astaire) chantant A Shine on your shoes avec un cireur de chaussures brosse le portrait d’une ville source d’émerveillements, de joies et de rencontres.

Tous en scène est l’apothéose de la comédie musicale hollywoodienne. La réunion de plusieurs talents, de l’écriture à la production, de la mise en scène à l’interprétation, aboutit à un chef-d’œuvre, avec des chansons et des numéros musicaux entrés dans la légende, et un des plus beaux couples de l’histoire du cinéma, Cyd Charisse et Fred Astaire. Cette réussite absolue est d’abord celle d’Arthur Freed, producteur, compositeur de chansons et maître des grandes comédies musicales de la MGM. C’est aussi un des films les plus aboutis de Vincente Minnelli.

Tous en scène ! demeure un film essentiel sur le monde du spectacle en général, et du cinéma en particulier. Comme l’explique la célèbre chanson « That’s Entertainement », tout ce que l’on vit peut être transposé sur scène, transformé en spectacle ou en film. C’est la morale délivrée par Tous en scène : les histoires et les sentiments les plus simples peuvent engendrer de belles œuvres, tandis que les idées pseudo intellectuelles et les gesticulations esthétiques sont rarement synonymes de réussite. L’art de Minnelli est classique, souvent tenté par le picturalisme, avec cependant le bon goût de se méfier des avant-gardes et de la vaine expérimentation. Chez lui, l’artifice décoratif n’est pas l’ennemi de la vérité, mais l’effet de style qui rapproche des personnages bien réels de leurs désirs et de leurs rêves. Vincente Minnelli est le styliste inspiré et sensible des émotions humaines, capable de colorier le monde et de mettre la vie en ballet et en chanson sans rien occulter de sa tristesse et de sa complexité.

Il y a dans Tous en scène à la fois le plaisir du spectacle et son autocritique, par l’intermédiaire d’une mise en abyme simple et pertinente. Le film de Minnelli raconte que dans la création cinématographique le vrai et le faux, le jeu et la réalité, le hasard et le talent ne cessent de se croiser, pour le meilleur et pour le pire. Bien avant La Nuit américaine de Truffaut ou Prenez garde à la sainte putain de Fassbinder, Minnelli montre l’importante de la troupe au cinéma, cette famille recomposée d’artistes et de techniciens qui vont vivre ensemble une aventure humaine intense, s’aimer, se disputer et se réconcilier avant de se séparer. — Olivier Père