Synopsis
6 films courts
La Boxe
Conte pour la route
Fioritures
Hop-là, Badigeonneurs !
Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge
La Nounou
Cycle II
Conte pour la route
Hop là, badigeonneurs!
La Boxe
La Nounou
Cycle III
La Nounou
Fioritures
Le Loup gris et le petit chaperon rouge
6 courts métrages où caricatures et burlesque sont à l’honneur : farce comique (Hop-là, badigeonneurs!), conte métaphorique sur l’amour (Conte pour la route), conte poétique et fantastique (La Nounou), métaphore sur l’absurdité de la condition humaine (Fioritures), désopîlante adaptation musicale du conte de Perrault et métaphore animée de la « Maison européenne » (Le Loup gris et Le Petit Chaperon rouge), pantalonnade burlesque (La Boxe).
Hop là, badigeonneurs est une farce comique qui met en scène deux peintres un tantinet stupides, Tiap et Lap – lointain écho de Laurel et Hardy …
Petit conte métaphorique, Conte pour la route narre les amours contrariés d’un petit camion et d’une jolie voiture rose. Mais rien ne peut s’opposer aux vraies amours…
La Nounou met en scène la solitude d’un jeune garçon, ignoré des adultes d’une nuit de réveillon. Réfugié dans son grenier, il fabrique ce personnage si familier de la culture russe : une nounou. Faite de vieux chiffons et de morceaux rapportés, il la baptise « Tchou tcha » (Choo-Choo dans la version française). Et Choo-Choo prend magiquement vie, entraînant notre héros dans une soirée pleine de surprises, que rythment les accords chauds et entraînants du jazzique Moonlight de Glenn Miller. Voici enfin la vraie fête, le vrai conte, ceux dont les enfants rêvent de toute éternité…
Fioritures : d’un petit rouleau de fil de fer va naître, un peu à la manière de La Linea (d’Osvaldo Cavandoli), tous les ornements du récit. Soit, dans l’ordre, un homme, des arbres et des fleurs, une maison, un chien, une femme, une palissade. Impossible combat de ce petit bonhomme de fil de fer, redoutable et absurde engrenage qui le mèneront, au nom de la recherche de sa tranquillité, à détruire tout son entourage et à finir attaché au piquet, à la place de son chien.
Désopilante adaptation en plastiline du célèbre conte de Charles Perrault, Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge est une comédie musicale, qui file la métaphore du terme, cher alors à Gorbatchev, de la « Maison européenne » : sur le chemin qui mène ce chaperon rouge et ce loup gris new look à Paris sont convoqués tous les vieux « démons » du dessin animé. Des trois petits cochons aux sept nains, en passant par quelques figures archétypales du cinéma d’animation soviétique… Qui est donc ce vieux loup gris famélique qui finit emprisonné alors que les personnages réunis du cartoon américain et soviétique s’unissent pour chanter des lendemains libres?
La Boxe ne se contente pas de retransmettre avec la « naïveté » attribuée usuellement à la plastiline un quelconque combat de boxe. Dans ce scénario en forme de pantalonnade, Garri Bardine introduit un principe de contraste et de « détournement » de situations archétypales. Le film caricature ainsi, sans avoir l’air d’y toucher, le sport-spectacle, les médias, les fanatiques, les rapports d’oppression entraîneurs-entraînés…
Distribution
Dans Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge, toute la séquence de première rencontre entre les deux protagonistes est conçue entièrement au seul service d’une chorégraphie de plastiline. Le sujet du conte devient un prétexte à démonstration.
Que l’on pense à l’inimitable danse du Loup qui semble ne le faire que pour prouver l’élasticité du matériau dont il est fait. Que l’on pense à ses gestes, vus en gros plan, qui, cette fois, concentrent notre attention sur la matière même dont il est constitué. Que l’on pense encore au tact dont il essaie de faire preuve face au Petit Chaperon rouge en détachant d’un geste badin sa queue (!) pour l’accrocher à l’arbre, comme s’il voulait fournir une nouvelle preuve du caractère pratique du matériau. Que l’on pense aussi au maniérisme étudié des mains du Petit Chaperon rouge dépliant l’affiche représentant le « Criminel », ou aux effets comiques des bords de son chapeau ou de ses cheveux « spaghettis » réagissant peureusement à l’agressivité du Loup, plans démontrant que la plastiline peut aussi régler à son avantage tout élément de détail. Que l’on pense enfin à la mobilité même et aux possibilités de réversibilité des décors.
Toutes les conclusions convergeront vers le même diagnostic : ce matériau ne sert pas seulement le rôle ou le récit, il est le récit, parce qu’il est comique presque par essence.
Générique
Hop là, badigeonneurs, 1984, URSS
Titre original : Tiap Liap Maliari
Animation plastiline, couleur 35 mm, 9 minutes 27.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateur : S. Khlebnikov
Décors : I. Lennikova
Animation : I. Sobinova-Kassil, N. Timofeeva, E. Gagarina, M. Pismane
Dessins : M. Mitiliachski
Montage : N. Trechtcheva
Directeur de production : Garri Bardine
Production : Soyouzmoultfilm
Ayant-droit : Stayer Studio
Distribution : Arkeion Films
Conte pour la route, 1981, URSS
Titre original : Dorojnaya Skazka
Animation dessinée, couleur
35 mm, 10 minutes.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateur : Kaboul Rassoulov
Décors et animation : Elena Fiodorova
Musique : Sergueï Anachkine
Son : Boris Filtchikov
Directrice de production : Ninel Lipnitskaya
Production : Soyouzmoultfilm
Ayant-droit : Stayer Studio
Distribution : Arkeion Films
La Nounou, 1997, Russie
Titre original : Tchou tcha
Animation poupées, couleur
35 mm, 25 minutes.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateur : Alexandre Dvigoubski
Décors et animation : Arkadi Melik-Sarkissian
Animateurs : L. Maïatnikova, I. Sobinova-Kassil, N. Timofeeva
Musique : Glen Miller joué par Max Greger
Son : Vladimir Vinogradov, R. Kazariane
Montage : Irina Sobinova-Kassil
Directrice de production : Natalia Donatova
Production : Soyouzmoultfilm
Ayant-droit : Stayer Studio
Distribution : Arkeion Films
Fioritures, 1987, URSS
Titre original : Vykroutatsky
Animation de fil de fer, couleur
35 mm, 10 minutes.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateurs : Vladimir Sidorov, Igor Skidan-Bossine
Décors : Irina Lennikova
Animation : Lidia Maïatnikova, Irina Sobinova-Kassil
Effets musicaux : A. Klevitsky
Montage : G. Filatova
Directeur de production : Garri Bardine
Production : Soyouzmoultfilm
Ayant-droit : Stayer Studio
Distribution : Arkeion Films
Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge, 1990, URSS
Titre original : Seryi Volk I Krasnaya Chapotchka
Animation plastiline, couleur
35 mm, 26 minutes.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateur : V. Prudnikov, V. Strukov, S. Khlebnikov
Décors et animation : L. Mayatnikova, I. Bobinova-Kassil, N. Fiodorova
Musique : Compilation
Son : V. Vinogradov, S. Karpov
Production : Soyouzmoultfilm
Distribution : Arkeion Films
La Boxe, 1985, URSS
Titre original : Brek
Animation de plastiline, couleur
35 mm, 10 minutes.
Scénario et réalisation : Garri Bardine
Opérateur : S. Khlebnikov
Créateurs des figurines : M. Miltlianski
Décors et figurines : V. Grichine, M. Koltounov, V. Petrov, V. Ladyguine, N. Mentchoukov, V. Maslov, A. Maximov, A. beliaev, S. Znamenskaia
Animation : I. Lennikova, I. Sobinova-Kassel, N. Fedossova, S. Koditsyne, M. Prisman
Musique : S. Khlenikov (Mélodie latino-américaine Chico-Chico, Tango la Jalousie, Blues Saint-Louis)
Son : V. Koutouzov
Montage : N. Trechtcheva
Production : Soyouzmoultfilm
Ayant-droit : Stayer Studio
Distribution : Arkeion Films
Autour du film
Rebelle aux modèles cinématographiques de l’ère soviétique, Garri Bardine a, consciemment ou non, exploré tous les genres minorés, mis à l’index ou rejetés par l’URSS des années 1970-1980, bâtissant l’essentiel de sa filmographie sur un rapport au burlesque.
A ce titre, son cinéma pourrait se définir comme celui du détournement des genres proscrits. Ce détournement est d’ordre parodique, Garri Bardine s’attachant à mettre en exergue ou à grossir certaines caractéristiques des genres imités, comme dans Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge, par exemple, où le loup, sorte de double d’Humphrey Bogart, joue le rôle d’un chanteur de charme.
La proscription, implicite, de ces genres en URSS remonte à l’ère post-révolutionnaire – incluant une sorte d’autocensure vis-à-vis du genre comique.
Garri Bardine s’autorise à compenser et à dépasser cette frustration, la transformant en « combustible » de son cinéma. Ce détournement fonctionne donc sur un « recyclage » de tout un refoulé du cinéma soviétique.
Le caractère mimodramatique de chacun des courts métrages, la place importante accordée à la caricature, l’éviction, la plupart du temps, de la parole (à l’exception notoire du Loup gris et du Petit Chaperon rouge), la rapidité de déroulement du récit ou des scènes, la place essentielle donnée à un fil conducteur musical expressif sont autant d’indices de la source burlesque.
Que peut-elle devenir dans une Russie désormais délivrée du joug de la censure mais cynique et désillusionnée? La Nounou y répond à sa manière : le temps ne se prête finalement plus à rire, il inquiète Garri Bardine. Et il tente de juguler l’inquiétude en revenant à la poétique du burlesque : celle qui sait éveiller chez chacun l’enfant qui sommeille.
Pascal Vimenet – février 2001
Pistes de travail
- Contexte russe
Ce choix de films soviétique et russe pourrait être l’occasion d’aborder la culture russe. La Nounou pourrait particulièrement bien s’y prêter dans les différences qu’elle met en exergue (climat, voitures, décorations, mobiliers, airs de fête, paroles, etc.)
- Genres
Il serait sans doute amusant de proposer aux enfants de trouver d’autres films et d’autres cinéastes d’un esprit proche. On peut penser à certains films de Tex Avery ou à ceux de Tim Burton ou de Nick Park.
- Animation
Tous ces films, quelles que soient les techniques utilisées (dessin animé, fil de fer, plastiline ou marionnettes) renvoient à un même principe d’enregistrement image par image, d’enregistrement discontinu.
Seul l’un d’eux (Conte pour la route) a été fait selon la méthode classique du dessin animé.
Tous les autres appartiennent à la catégorie des films d’animation en volume et exigent, de ce fait, un travail de mise en scène et un positionnement de la caméra banc-titre différents.
- Fil musical
Peut-être faut-il imaginer d’attirer l’attention des enfants sur le fil musical et sonore des films de Bardine avant les séances. Son rapport aux actions décrites est souvent très efficace.
- Narrations
Chacune des narrations est simple et renvoie parfois à un conte connu. Faciles à retenir, ces histoires pourraient être un point de départ pour des jeux de reconstruction orale, dessinée ou chantée.
Mise à jour : 17-06-04
Expériences
L’œuvre de Garri Bardine est en train d’être découverte aujourd’hui en Europe occidentale.
Les 6 films du programme appartiennent aux années 80 et 90, c’est-à-dire à une période charnière.
Fioriturees est le parfait exemple d’un itinéraire qui a peu à peu mené Bardine à s’éloigner de ses premiers exercices, plus traditionnels, pour jouer d’un matériau devenu matrice narrative et esthétique corrosive.
Fioritures annonce le débridement des films suivants, la véritable renaissance d’un courant comique, proche du burlesque. Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge constitue l’apothéose de cette trajectoire.
Mais le succès foudroyant de ce film symbolise aussi la chronique d’une mort annoncée : celle du studio étatique Soyouzmoultfilm, dans lequel officiait Garri Bardine.
C’est dans ce nouveau contexte qu’est apparu, en 1991, « Stayer », un studio fondé par Garri Bardine avec une douzaine de collaborateurs démissionnaires de Soyouzmoultfilm. En neuf ans, Stayer a présidé à la production notamment du Chat botté, de La Nounou et d’Adagio.
C’est dans ce contexte concurrentiel, plus rude, qu’il faut sans doute « lire » ces trois derniers films de Bardine. La farce menace à tout moment de tourner au drame…
Outils
Bibliographie
Le Banquet, Babette Lombardi, Animatographe n° 3, 1987.
La Boxe, document Zozor, Pascal Vimenet, Ecole et cinéma d'animation, 1994.
Le chat botté, document AFCAE jeune public, 1996.
La nounou, document AFCAE jeune public, 1999.
La nounou, Yves Bon, Yves Bourgeeay, Brette Carié, Annie Gay, Céline Mathieu, Philippe Quaillet, collection "Un film, un dossier", Ligue de l'enseignement, 1999.
Cartoons, le cinéma d'animation, 1892-1992, Ed. Liana Levi, 1991.
Garri Bardine, Claire Vassé, Positif, mars 1996.
Le petit soviet enchanté de Garri Bardine, Philippe Piazzo, Aden, 1999.
Garri Bardine, l'animation comme remède aux maux de ce siècle, Sandrine Fillipetti, Repérages, 1999.
Le Gepetto russe, Bernard Génin, Télérama n° 2598, 1999.
Vidéographie
A propos de la nounou..., "Etude du langage cinématographique", Ligue de l'enseignement
Arkeion Films (cassette complémentaire du dossier cité précedemment)