Synopsis
Otar, Géorgien parti vivre à Paris, est la fierté de sa mère, Eka, qui vit constamment dans l’attente de ses nouvelles. Seulement un jour, les lettres n’arrivent plus. Otar est mort, là-bas, loin d’elle… Sa fille, Marina, et la nièce de celle-ci, Ada, vont alors tenter de lui dissimuler la terrible nouvelle.
Générique
Réalisation : Julie Bertucelli
Scénario : Julie Bertucelli, Bernard Renucci
Image : Christophe Pollock
Son : Henri Morelle
Costumes : Nathalie Raoul
Décor : Emmanuel de Chauvigny
Montage : Emmanuelle Castro
Production : Les Films du Poisson
Distribution : Haut et Court Distribution
Sortie en France : 17 septembre 2003
Couleur
Durée : 1 h 42
Interprétation
Eka / Esther Gorintin
Marina / Nino Khomasuridze
Ada / Dinara Drukarova
Tengiz / Temour Kalandadze
Rusiko / Roussoudan Bolkvadze
Alexi / Sacha Sarichvili
Niko / Douta Skhirtladze
Le berbère / Abdallah Moundy
Autour du film
Sur cette base scénaristique inspirée d’une histoire vraie, il eût été possible de tisser divers canevas, du « bucoliquo-mélancolique » à la Jeunet à la sur-dramatisation larmoyante. Julie Bertucceli emprunte avec sagesse un chemin médian, en se colletant à l’exercice de la sincérité, de l’honnêteté affective. Du monde du documentaire (Bienvenue au grand magasin, Un Monde en fusion), la cinéaste a gardé un goût pour le détail, les émotions diffuses et la proximité. La caméra explore donc de près le visage de ses protagonistes, leurs yeux, leurs rides et leurs sourires, et fonctionne à l’économie. C’est dans cette simplicité que le long métrage excelle, notamment lors d’une scène de fête, éthérée et envoûtante, qui transporte loin et pour longtemps. Certes, l’on peut également reprocher à cet ascétisme volontaire une certaine étanchéité. Mais celle-ci ne se fait sentir que pour être contournée, comme dans cette séquence où Eka, qui est de ces vieux qui « ne pleurent plus, ou alors seulement parfois du bout des yeux« , comme le chantait un autre absent, découvre brutalement la vérité en rendant une visite surprise à son fils mort depuis des mois. C’est le ciel de Paris qui fond en larmes à sa place, lavant par là même les espoirs d’hier. Alors une fiction chasse l’autre, et tandis qu’Ada fait des adieux muets à son passé, derrière les portes vitrées d’un aéroport, ce sont des horizons nouveaux, de Stand-By (Roch Stephanik) ou de Persépolis (de la bédéaste Marjane Satrapi) à la géorgienne, qui s’offrent à notre imaginaire.
Guilllaume Massart / film de culte. com
Julie Bertucelli a l’élégance de ne pas braquer les feux sur la décrépitude du pays, mais de la faire surgir par petites touches délicates. Une mère qui partage le canapé-lit avec sa fille, une coupure d’eau qui survient au beau milieu d’un shampoing, un téléphone en plastique orange qui hoquette, une effarante tabagie dans un cabinet de cardiologie… Ces petites humiliations du quotidien clignotent dans les recoins d’une image lisse et tranquille, jamais tentée par le folklore facile.
Cette modération dans la mise en scène tient sans doute au respect de la réalisatrice pour ses trois actrices, qui incarnent avec majesté trois générations de Géorgiennes marquées par l’Histoire, chacune à leur façon. La plus jeune (Dinara Droukarova) traduit en finesse l’énergie secrète et butée des enfants du postcommunisme, inaptes à la culpabilité. Les yeux de la mère (Nino Khomasuridze) brûlent d’un feu bleuté, inquiétant et destructeur. Ile en disent long sur l’inadaptation irrémédiable des quinquagénaires, nourris au lait communiste, et trop brutalement sevrés. Mais la doyenne, Esther Gorintin, reste la plus éblouissante…. Réfugiée en France et rescapée des rafles antijuives de l’Occupation, aurait-elle imaginée dire un jour cette réplique : « Si stalinienne veut dire honnête, patriote, altruiste, alors oui, je suis stalinienne et fière de l’âtre » ?
Marine Landrot / Télérama 2003
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Films
Otar Iosseliani, le merle siffleur de Julie Bertuccelli
La fabrique des juges ou les Règles du jeu de Julie Bertuccelli, Bernard Renucci
Fiche pédagogique sur le site du cndp.fr