Pays des sourds (Le)

Pays des sourds (Le)

France (1993)

Genre : Autre

Écriture cinématographique : Documentaire

Collège au cinéma 1994-1995, Collège au cinéma 2015-2016

Synopsis

Dans le silence le plus total, devant des partitions musicales, quatre personnes prennent grand plaisir à  chanter en s’accompagnant du geste…
Un professeur, dans une école spécialisée, donne un cours de langue des signes… Petit à  petit, le spectateur entre dans un monde qui lui est d’abord totalement étranger, à  travers les enfants d’abord, Karen, Florent, Jalal, Aboubaker (dit Abou), Anh Tuan, Tomo, Betty, Frédéric. Leurs efforts pour apprendre à  parler sous la direction d’un professeur et d’une éducatrice alternent avec les confidences d’adultes sur leurs relations avec leur famille ou leur entourage, sourds ou entendants, dans leur travail, ou du professeur sur son enfance, le cinéma, la naissance de sa fille…
Certains font du théâtre, d’autres accueillent des sourds venus des États-Unis et nouent avec eux des relations si fortes que la séparation est douloureuse.
Leur surdité n’empêche pas Hubert et Marie-Hélène de se marier, de louer un appartement, d’avoir un enfant, même si cela pose quelques problèmes de communication sociale.
Parmi les enfants, on voit Abou, Tomo et Florent dans leurs familles respectives. à€ la fin de l’année, le directeur de l’école commente les progrès de chacun et décrit les multiples obstacles qu’il leur reste à  surmonter. Après les récompenses, les enfants se distraient à  la fête foraine. Et lorsque le professeur “ signe ” le mot FIN, nous quittons à  regret un univers presque familier.

Le film fait entrer progressivement dans le monde des « €œ sourds « €, à  travers une dizaine d’enfants et leurs efforts pour apprendre à  parler sous la direction d’un professeur et d’une éducatrice. Des adultes parlent de leurs relations avec leur entourage, sourds ou “ entendants ”… Certains font du théâtre, d’autres accueillent des sourds venus des ɉtats-Unis. Un couple de sourds se marie… On suit des enfants dans leurs familles respectives et, à  la fin de l’année, le directeur de l’école commente les progrès et les enfants se distraient à  la fête foraine.

Distribution

Des êtres obstinés

Le professeur de langue des signes
Fil conducteur du film – c’est lui qui apporte le mot “ FIN ” –, Jean-Claude Poulain n’en est pas pour autant le simple porte-parole de Nicolas Philibert. Il passe progressivement au cours du film du statut un peu abstrait de “ professeur ” et de défenseur acharné de la langue des signes et du bilinguisme, et sans perdre sa passion, voire son intransigeance, à celui d’enfant (lorsqu’il raconte son enfance), d’amant (sa rencontre avec sa compagne) et de père (la naissance de sa fille). L’émotion, chez lui, est sans cesse tempérée par l’humour, en particulier lorsqu’il explique qu’il aurait préféré que sa fille naisse sourde afin d’avoir une meilleure communication avec elle, mais qu’il l’aime tout de même.

Le professeur (des enfants)
Malgré quelques sourires, elle apparaît comme l’antithèse de Jean-Claude Poulain. La dureté, la sévérité font partie de sa mission. Le spectateur réclamerait plus volontiers de sa part plus d’indulgence, plus de pitié. Mais la méthode porte ses fruits. Lorsque Florent répète sans cesse la même faute et qu’elle refuse de continuer avec lui, ce dernier fait un effort ultime et parvient à émettre le son attendu, laissant à penser que sans la persévérance et l’intransigeance du professeur, il n’aurait pas fourni l’effort ultime et serait resté sur son échec. La remise des récompenses la montre souriant à plusieurs reprises devant les commentaires du directeur : le travail est accompli et elle peut se laisser aller à une tendresse qu’elle retient l’année durant.

Florent

C’est le plus fragile et le plus émouvant des enfants, hypersensible, sans cesse au bord (ou au-delà) des larmes. Mais on comprend peu à peu qu’il est conscient de ses pouvoirs et qu’il sait jouer de sa faiblesse comme de son handicap. Non seulement il détourne les questions de sa mère pour mieux l’intriguer, mais il dévoile clairement son jeu en accaparant pour lui-même l’objectif de la caméra et le micro.

Tomo

Il fait apparemment partie de ceux qui ont le plus de chances de trouver un équilibre, enfant aimé et élevé par des parents sourds. Ce n’est qu’à la fin que nous apprenons qu’il est le moins attentif à l’école, qu’il y apporte des pétards et qu’il “ squatte ” fréquemment le bureau du directeur. Trop de facilité pour être conscient de la nécessité de l’éducation “ oraliste ”, lui qui pratique la langue des signes chez lui sans doute depuis son plus jeune âge ? Trop d’amour et d’indulgence maternelle ? Jalousie à l’égard de son jeune frère ? Tomo reste un bloc mystérieux et impénétrable.

Abou

C’est évidemment l’inverse de Tomo et c’est pourquoi leur journée avec leurs parents est montée en parallèle. Il a tout pour échouer. Sa famille, peut-être chaleureuse, ne connaît que la communication orale et le tient encore pour infirme, marginal. Seule son opiniâtreté qui lui permet de progresser.

Les Mariés
Ils vivent dans leur monde à part. Mariés par les familles, le maire et surtout le curé, ils se heurtent aux difficultés sociales quotidiennes (acheter un appartement), sans cesse sur le point de s’y noyer (comme la mariée enceinte qui perd l’équilibre dans la piscine). Même isolés dans un monde à part (le père face à l’enfant, à la fin), ils vivent une vie de couple “ normale ”, avec une obstination calme.

Générique

Production Les Films d’Ici, La Sept cinéma, le Centre Européen Cinématographique Rhône-Alpes, en association avec la Région Rhône-Alpes, Canal Plus, Le C. N. C., la Fondation de France, le Ministère des Affaires Étrangères, RAI TRE, BBC Television, R.T.S.R. et le soutien de la Fondation Gan pour le Cinéma.

Réalisation Nicolas Philibert
Scénario Nicolas Philibert
Photo Nicolas Philibert
Son Henri Maïkoff
Montage Guy Lecorne
Film Super 16 “ gonflé ” en 35 mm Couleurs
Format 1/1,66
Durée 1 h 39
N° de visa 77 053
Distribution MKL Distribution
Sortie en France 3 mars 1993

Intervenants
Le professeur de la langue des signes : Jean-Claude Poulain
Professeur : Odile Ghermani
Éducatrice : Babette Deboissy
Le directeur de l’école : Denis Azra
Le jeune marié : Hubert Poncet
La jeune mariée : Marie-Hélène Poncet
Les autres sourds connus:
Claire Garguier
Victor Abbou, le frère de Daniel Abbou
Levent Beskardes
Monica Flory
Chantal Liennel

Autour du film

La poésie comme pédagogie du regard

Certes, Le Pays des sourds appartient au genre documentaire et l’on ne saurait nier qu’il nous informe aussi bien sur la langue des signes que sur cette étrange planète des sourds qui ne saurait désormais être pour étrangère. Tout se passe pourtant comme si Nicolas Philibert entendait non pas se dérober au genre, mais l’interroger. Dès la seconde scène du film, après un déconcertant quatuor silencieux, un jeune homme, Fred, vient confier son désir impossible de faire du cinéma, ce cinéma que l’on retrouvera plus tard dans les souvenirs d’enfance du professeur comme sous la forme d’un inquiétant écran vide au mur d’une salle de classe. Et c’est encore un autre aspect du cinéma, celui du désir de fiction et de narration, qui hante le film de bout en bout.

Le Pays des sourds fonctionne sans cesse sur l’échange, l’équivalence, le contrepoint, dans une combinatoire aussi complexe et agile que la langue des signes elle-même. Tous les moyens sont bons, signes, paroles déformées, expressions du visage, regards, pour raconter et se raconter. Et certains passent de l’un à l’autre avec une aisance rare, quand le réalisateur ne les utilise pas simultanément : celle qui raconte en langue des signes ses difficultés de communication avec les entendants dans le même temps qu’elle énonce très distinctement son propos, à tel point que l’on ne sait plus si le sous-titre traduit les gestes ou la parole.

Le cinéma est utilisé ici en parfaite homothétie avec, non seulement la langue des signes, mais l’ensemble des langages mis en jeu. À la rigoureuse correspondance qu’établit le documentaire au sens strict entre la réalité observée et sa représentation sur l’écran, Nicolas Philibert préfère les chemins de traverse de la métaphore et de la métonymie. Non par coquetterie d’esthète refusant avec hauteur tout didactisme mais précisément par souci pédagogique. Commenter, expliquer, mettre le doigt sur l’essentiel, désigner les responsables d’un état de fait – ce que fait à longueur de reportage la télévision sans rien y changer –, quoi de plus reposant pour le spectateur ? Au contraire, Le Pays des sourds ne cesse de le désorienter, de le perdre, de l’obliger, sans guide, à établir lui-même ses propres passerelles : relier, par exemple une brève scène où une commerçante communique sans difficulté avec une touriste américaine sourde et celle de la visite de l’appartement avec son agent immobilier, totalement sourd, lui, intellectuellement parlant. À nous, à l’inverse, de ne pas nous contenter d’admirer de notre fauteuil confortable les efforts déployés sur l’écran et de nous frayer notre propre voie à travers le pays des sourds.

Les scènes les plus fortes et souvent les plus belles découlent de cette démarche où une pédagogie réelle du regard débouche sur la poésie pure. C’est le malaise engendré par le mariage à l’église, différemment apprécié par les sourds et par les “ entendants ”. C’est cet étrange moment où l’on ne sait plus très bien si Tomo joue réellement du piano ou rêve. C’est ce rideau de classe où le souffle du vent renvoie à celui des enfants et où la lumière se substitue au chant qu’ils ne peuvent entendre…
Joël Magny

Un monde où l’image est reine
“ Dans Le Pays des sourds, tout passe par le regard. Les mots sont rares et souvent incompréhensibles. Ou bien serrés, en sous-titres, en bas de l’écran, comme une traduction simultanée dont il faudrait apprendre à se passer. Si les héros du film de Philibert parlent, c’est avec les gestes et les yeux. Des yeux qui rappellent ceux des acteurs du muet. Exagérément ouverts, extraordinairement mobiles… La caméra capte les signes comme autant de petits récits en images : de petites mises en scène dans la mise en scène… Et d’anecdotes en bêtises, on finit par oublier leur infirmité. Comme on l’a oubliée pour les adultes… Dans Le Pays des sourds, [Nicolas Philibert] nous plonge dans un monde où l’image est reine, et le cinéma omniprésent. Ah, oui, en s’inscrivant dans l’espace dans un cadre très précis […], les gestes du langage des signes correspondent tout simplement aux plans serrés, aux plans larges et aux plans-séquences ! Nicolas Philibert joue de cette correspondance en virtuose. Passeur magique entre deux mondes qui, jusque-là, ne se rencontraient pas. ”
Marie-Élisabeth Rouchy, in “ Télérama ”, 10 mars 1993.

Le rôle médiateur du cinéaste
“ Nicolas Philibert met sa place de cinéaste en jeu, la maintient en éveil, la soumet en mouvement, au temps des autres, sans perdre cependant sa maîtrise ni son point de vue (car c’en est un, et il est fort). Pour ceux qui n’entendent pas, la technique devient le symbole d’une écoute et, pour ceux qui ne savent plus écouter, elle traduit un dialogue “en bonne entente“. Cette manifestation du rôle de médiateur du cinéaste n’est qu’un des principes fondateurs du film de Nicolas Philibert (qui ne s’arrête pas en si bon chemin) et ferait presque figure d’évidence banale si cette méthode n’était visiblement tant minoritaire. ”
Frédéric Strauss, in “ Cahiers du cinéma ”, n° 464, février 1993.

Une langue amie du cinéma
“ Condamné à inventer de nouvelles méthodes de filmage pour s’adapter à son sujet, Philibert en saisit l’occasion pour travailler la matière même du cinéma. Son intuition magnifique, c’est que la langue des signes est une langue amie du cinéma et que sa grammaire et ses lois appartiennent à une lignée cousine. Plutôt que de bâtir à ses hôtes sourds une énième petite chapelle documentaire, il leur ouvre en grand la cathédrale du cinéma, réalisant un film non pas sur eux, mais pour eux et pour tous ”
Olivier Séguret, in “ Libération ”, 4 mars 1993.

Vidéos

Pistes de travail

Contre l’exclusion

    • Méthode oraliste et méthode gestuelle
      Plusieurs méthodes sont à l’œuvre pour éduquer les sourds, la langue des signes qu’utilise le professeur Jean-Claude Poulain ou les enfants entre eux (au réfectoire, par exemple), et l’apprentissage de la parole à partir de restes auditifs amplifiés par un appareillage particulier. Bien les faire distinguer et en montrer la complémentarité : l’une concerne plus les relations des sourds entre eux, l’autre celles des sourds avec les “ entendants ”.
    • Construction du film
      Le Pays des sourds paraît rassembler un ensemble de documents et de témoignages livrés en vrac. Faire découvrir progressivement l’organisation du montage et la façon dont on passe du groupe aux individus, dans leur famille comme dans leur vie sociale.
    • Le comportement physique des sourds
      Montrer comment la surdité développe d’autres types de relations et de comportements que chez les entendants : une solidarité qui passe par des démonstrations plus physiques, plus extériorisées, des enfants qui se donnent la main (après la photo de classe, en allant poster la lettre à Frédéric) aux démonstrations d’amitié et de tristesse des sourds adultes à l’aéroport.
  • Les enfants sourds dans leur famille
    Étudier la situation de chacun des enfants que l’on voit au sein de sa famille. Tomo est très à l’aise avec ses parents entendants, mais à la distribution des prix, sa mère est surprise de découvrir son comportement à l’école (game-boy, pétards…). La famille d’Abou ne sait pas comment communiquer avec lui, mais une tendresse certaine passe à travers l’offre de nourriture comme dans le regard de sa mère (?) devant les compliments du directeur en fin d’année. Florent, timide, craintif, toujours prêt à pleurer à l’école, se révèle espiègle avec sa mère. Attention à ne pas blesser certains élèves en laissant émettre des jugements hâtifs sur certaines situations familiales semblables à la leur (famille d’Abou, en particulier).
  • Mime et langue des signes
    À partir de certains éléments de la langue des signes entrevus dans le film – démarche du chien, de l’éléphant, description du cinéma, voiture qui roule… –, on peut montrer qu’il ne s’agit pas seulement de mimer n’importe comment un être ou une situation, de faire des “ singeries ”, mais que les signes nécessitent des mouvements très précis, combinés, où chaque nuance a son importance.
  • Informer sans apitoyer
    Montrer que le film est avant tout un film sur la langue des signes la communication, la lutte contre l’exclusion, et non un film sur les handicapés. Montrer à cette occasion que les témoignages sur les difficultés que rencontrent les sourds, jusqu’à être assimilés à des débiles mentaux, ne cherchent jamais à nous apitoyer mais simplement nous informer pour renforcer notre conviction de la nécessité d’étudier la langue des signes, tant pour les sourds que pour les entendants désireux de communiquer avec eux.
  • L’interdiction de la méthode gestuelle
    Expliquer pourquoi la langue des signes a été interdite en 1880, dans le but louable de donner à tous la même éducation (orale), soutenu par la foi dans les progrès de la science qui parviendrait bientôt à vaincre la surdité par l’appareillage des sourds.
  • N’oublions pas
    Dans son programme d’“ hygiène raciale ”, Hitler interdit aux sourds d’avoir des enfants, considérant que la surdité était une maladie héréditaire. De 1933 à 1939, il fit stériliser 17 000 sourds. Et, de 1940 à 1942, 1 600 sourds furent transférés puis exterminés dans les camps d’Hadamar, Sonnenstein et Grafeneck.Mise à jour : 17-06-04

Expériences

Le regard des autres…

Le Pays des sourds n’est pas, de loin, le premier film à évoquer le handicap physique au cinéma. Dans les tout premiers temps, le cinéma burlesque français des années 10, puis le splastick américain s’en est emparé. On se souvient du strabisme de Ben Turpin ou de l’embonpoint d’Oliver Hardy ou du bien nommé “ Fatty ”, Roscoe Arbuckle, sans négliger l’incapacité de Harpo Marx à recourir à la parole, sans cesser pourtant de communiquer, ou l’enveloppement de Margaret Dumont, goujatement souligné par le frère du précédent, Groucho : “ Vous aimez la nature ? C’est bien du courage après ce qu’elle vous a fait ! ” Ce pourrait même être slogan de bon nombre de films de fiction mettant en scène des handicapés. Impossible de ne pas songer aux nombreux cas particuliers de l’histoire du cinéma. Dans L’Oiseau noir (The Blackbird, 1928), de Tod Browning, Lon Chaney devient le chef de la pègre d’une grande ville américaine après avoir été amputé des jambes par erreur de diagnostique (on dirait aujourd’hui en raison du “ principe de précaution ”). Sans oublier les personnages de Freaks (1932), du même Browning, véritables handicapés (homme-tronc, sœurs siamoises, nains, mongoliens, lilliputiens…), qui font passer le handicap à la monstruosité selon le titre français (La Monstrueuse Parade), pour mieux détruire cette notion.

Le cinéma de fiction a laissé des chefs-d’œuvre dans ce domaine. Sans aller jusqu’à évoquer Elephant Man (David Lynch, 1980) ou le héros de Johnny Got His Gun (Johnny s’en va-t-en guerre, 1971), jeune soldat américain mutilé durant les combats de 1914 au point de ne plus être qu’un “ morceau de viande ” même pas jugé digne de servir d’exemple pour les générations futures, il est indispensable de parler du film auquel ne manque pas de renvoyer le cinéphile sensible, que Nicolas Philibert y ait ou non songé. Miracle en Alabama (The Miracle Worker, 1962) raconte l’histoire d’une jeune “ autiste ”, Helen Keller, sourde, aveugle, muette, qu’une éducatrice de choc, Annie Sullivan (Anne Bancroft), amène vers la parole, le “ miracle ” ultime du film. Ce qu’écrivait Claude-Jean Philippe dans “ Les Cahiers du cinéma ” (n° 140, février 1963) rapproche de façon étrangement prémonitoire le film de Penn – qu’il considère, malgré ses origines théâtrales – comme “ un documentaire sur l’éducation des sourds-muets ” et Le Pays des sourds, citant d’abord le philosophe Brice Parain dans Vivre sa vie, de Jean-Luc Godard (1962) : “ Parler, c’est presque une résurrection par rapport à la vie, en ce sens que, quand on parle, c’est une autre vie que quand on ne parle pas… Et alors, pour vivre en parlant, il faut avoir passé par la mort de la vie sans parler. ” Claude-Jean Philippe ajoutait : Helen est bien passée de cette “ mort de la vie sans parler ” qui est aussi, selon Brice Parain, celle de “ la vie sans amour ”.

C’est aussi une éducation de et par la parole qui est en jeu dans le film de François Truffaut – tout entière traversée par le souci de l’apprentissage et de la culture –, L’Enfant sauvage (1970), largement inspiré du cas réel de Victor de l’Aveyron, vers 1798. Si les efforts du docteur Itard/François Truffaut ne permettront sans doute jamais à Victor d’accéder à la parole, la communication qui s’établit peu à peu entre l’enfant et le professeur, avec ses moments de bonheur et de violence, permet à Victor d’entrer dans la sphère de l’affectivité qui se confond, pour Truffaut, avec la civilisation.

Le Pays des sourds s’inscrit également dans un refus du misérabilisme, de la culpabilisation, du sensationnel, du voyeurisme, comme de toute forme de paternalisme, qui désigne le titre d’un film réalisé autrefois par Jean-Luc Héridel et Sabine Mamou, Ames charitables s’abstenir (1970). Plus significatif est encore le titre du film réalisé par le cinéaste argentin Fernando Solanas, alors en exil en France, Le Regard des autres (1980), titre repris depuis pour un programme de courts métrages. Pour lui, c’est le regard (et l’écoute) des autres qui crée le handicap. Pour lui, comme pour Truffaut ou Nicolas Philibert, apprendre à regarder, c’est apprendre à aimer.

Outils

Web
http://www.arte.tv/fr/nicolas-philibert/343112,CmC=343118.html
Entretien avec le réalisateur Nicolas Philibert pour le magazine Court-Circuit

http://www.nicolasphilibert.fr/media/objets_telechargeables/PDS-entretien.pdf
Entretien avec Nicolas Philibert (document à télécharger sous format PDF)

http://savoirs.ens.fr/expose.php?id=1978
Table Ronde autour du film de Nicolas Philibert

http://www.france5.fr/emissions/l-oeil-et-la-main/diffusions/09-02-2015_299819
Retrouvailles du réalisateur Nicolas Philibert avec certains enfants du film devenus grands

http://www.nicolasphilibert.fr/
Le site officiel du réalisateur 

Vidéographie
Sourds à l’image  (documentaire de 1995)
Le souffle

Films sur la même thématique
Miracle en Alabama (1962)
L’enfant sauvage (1970)
La famille Bélier (2014)