Biographie
John Boorman est né le 18 janvier 1933, à Epsom (Grande-Bretagne) dans un milieu aisé. Sa famille est d’origine écossaise, irlandaise et néerlandaise. Il passe la Seconde Guerre mondiale à Shepperton. Après des études chez les Jésuites, il se lance dans une entreprise de laveries automatiques, puis entre à la BBC comme producteur d’émissions documentaires et devient stagiaire-monteur à la télévision en 1956. à partir de 1958, il est réalisateur et tourne une centaine d’émissions, dont l’originalité capte l’attention de tous.
Dans son premier succès au cinéma, (Le Point de non-retour, 1967), tourné à Hollywood pour la MGM, il investit le film de genre (thriller) pour imposer son univers et ses conceptions esthétiques, travaillant l’image et la couleur à la façon d’un peintre, désaxant les stéréotypes du film policier avec audace et vampirisant cette histoire de truand pour en faire une fable métaphysique où l’expérimentation visuelle produit une sensation onirique et oppressante. Les thèmes de la trahison et de la marginalité, comme révélatrice existentielle, y sont la nourriture morale du récit. Mais la présence de la star Lee Marvin indique également que Boorman veut travailler à l’intérieur du système du cinéma populaire, quitte à le subvertir clandestinement par la forme en usant d’une stylisation nouvelle qui met en crise les caractères, sans toutefois se complaire dans une abstraction théorique.
La nature comme révélateur de la vérité humaine
Son idée principale est alors de décaler les situations traditionnelles du film de genre pour les pousser à l’extrême : film de guerre réduit à la seule opposition de deux soldats ennemis échoués sur ‘eele du Pacifique dans Duel dans le Pacifique (1968) ou drame psychologique sur la crise morale d’un individu devenant un apologue burlesque et théâtralisé de l’antiracisme avec Leo the Last (1970). La science-fiction, le film d’horreur, les aventures médiévales, le récit d’aventures dans la jungle, la comédie suivront comme base de travail pour toujours mettre en place des labyrinthes où la violence restera lyrique jusqu’à un paroxysme de catastrophe où elle devient sourcier implacable de la nature profonde des uns et des autres.
La nature est une de ses obsessions majeures. Elle est omniprésente dans Delivrance (1973) et La Forêt d’émeraude (1985), mais se trouve toujours être une part intégrante du récit (et non pas seul décor), aussi mystérieuse et inquiétante dans les films urbains ou de science-fiction que dans les fables cosmiques, car elle a toujours un rôle de révélateur de la vérité humaine et animale de ceux qui la traversent ou l’habitent.
L’homme face à lui-même
Si chaque personnage cherche obstinément quelque chose dans les films, de Boorman, il ne trouve finalement que lui-même en bout de route, et n’a pas lieu d’être alors vraiment fier de ce qu’il découvre.
à la fois moraliste et visionnaire, sachant que l’homme se fuit par ses propres mensonges, il le place généralement dans un piège à l’intérieur duquel il est contraint, physiquement et intellectuellement, à tomber ses masques, quitte à se retrouver ensuite abominable ou sans idéal ni Dieu.
Dans ses films, il y a toujours la collusion du voyage mental et du parcours physique dans des lieux naturels et séduisants, mais généralement hostiles. L’épreuve y est permanente. On y sent les étapes douloureuses de l’initiation absolue ; d’où la présence de prêtre exorciste, de chamans ou de magiciens dans une bonne partie de l’œuvre.
Les notions de Bien et de Mal, de fortes confrontations sulfureuses entre deux civilisations ne sont jamais présentées comme caricaturales ou schématiques dans ses films. Même si la nature en est la matière première (eau, feu, forêt, rochers, etc.), elle change de rôle selon ce que la fable met en scène. Aucun code récurrent n’est d’ailleurs installé chez lui. La civilisation du futur de Zardoz ressemble à celle du médiéval Excalibur et les univers parallèles de L’Hérétique viennent autant des utopies de la bande dessinée classique des années trente que des fantasmagories du film d’horreur moderne, tout en jouant sur les panoplies emblématiques du merveilleux ou des cauchemars autant que sur les contes et légendes gothiques.
Cela n’empêche pas de sentir la nostalgie qui habite le cinéaste, non pas celle de l’enfance, comme le montre durement La Guerre à sept ans, mais celle d’une cosa mentale qui interroge les traditions et les cultures anciennes dans l’espoir de retrouver une harmonie entre la nature et l’homme. Toute cette espérance traverse La Forêt d’émeraude, mais elle se heurte à l’évidence de son impossibilité d’être. Pourtant, de film en film, la démarche de Boorman s’attache à chercher comment l’harmonie pourrait revenir sur le monde.
C’est pourquoi chacun de ses films est une odyssée métaphysique où le réel entre nécessairement en collision avec les forces de l’inconscient humain, comme il en est d’usage dans les récits de la mythologie, à la différence que, dans ses films, si le héros se transforme au fil du récit, il ne trouve, à la fin de son parcours, que lui-même, dans son malheur profond de mortalité à venir.
Il résulte de tout cela que Boorman est un fabuliste loin des morales sociales, politiques ou dogmatiques. Il utilise les machineries du cinéma spectaculaire, des stars hollywoodiennes et des véhicules de genre pour interroger l’utopie fondamentale de toutes les civilisations : trouver l’osmose avec les natures, et montrer aussi les illusions contenues dans cette quête.
Filmographie
- 1965 Sauve qui peut (Catch Us if You Can)
- 1967 Le point de non-retour (Point Blank)
- 1968 Duel dans le Pacifique (Hell in the Pacific)
- 1970 Leo the Last (id.)
- 1973 Délivrance (Deliverance)
- 1973 Zardoz (id.)
- 1977 L'exorciste II, l'hérétique (Exorcist II : The Heretic)
- 1981 Excalibur (id.)
- 1985 La forêt d'émeraude (The Emerald Forest)
- 1987 La guerre à sept ans (Hope and Glory)
- 1990 Tout pour réussir (Where the Heart Is)
- 1995 Rangoon (Beyond Rangoon)
- 1997 Le Général (The General)
- 2000 The Tailor of Panama (id.)
- 2004 Country of my skull
- 2006 Memoirs of Hadrian (en préparation)Mise à jour le 29 avril 2009
Outils
Bibliographie
Rêves prometteurs ; Coups durs ; Journal de l'année 1991, John Boorman, Ed. Actes Sud - Institut Lumière
Zardoz, John Boorman, Ed. Seghers, 1974
Boorman un visionnaire en son temps, Michel Ciment, Editions Calmann-Lévy, 2003
Vidéographie
La Forêt d'émeraude
DVD MGM Zone 1, (Réservé au cadre familial privé)
Delivrance
Dist. ADAV n° 27002
Excalibur
Dist. ADAV n° 27007
Exorciste II : l'hérétique
Dist. ADAV n° 49458
Zardoz
Dist. ADAV n° 44742
Le Général
Dist. ADAV n° 35250