Biographie
Le parcours de Bruno Podalydès (né en 1961) est inséparable de celui de son frère Denis Podalydès (né en 1963), principalement acteur et qui a, jusqu’à ce jour, joué dans tous ses films. Ils ont la chance d’avoir un père qui organise des projections familiales le dimanche après-midi, « à la manière d’un Henri Langlois local », disent-ils.
Très jeunes, ils s’initient à diverses formes de spectacles : marionnettes, diaporamas… Ils auraient monté, vers l’âge de dix ans, un spectacle de leur invention, Pignouf au royaume de Banga. Au lycée, ils créent une radio qui circule sur cassettes, Radio Poupoune.
Après une Maîtrise d’Audiovisuel à Paris VIII-Saint-Denis, Bruno réalise des films d’entreprise, en particulier pour Air France, interprétés par Denis.
En 1986, Albert Capon mécanicien est le premier volet d’une série que Bruno aurait aimé poursuivre, avec son frère dans le rôle d’un homme aux cent métiers, en qui il voit « l’Antoine Doinel du film d’entreprise ».
En 1991-92, Versailles Rive-Gauche est un petit événement aux grandes répercussions. Il aborde la comédie, voire le burlesque, genres alors encore peu prisés par les jeunes cinéastes français. Le film a également un format inhabituel (47 minutes), longtemps considéré comme inexploitable en salle. Il sort pourtant avec succès au Saint-André-des-Arts à Paris, couplé avec un « moyen métrage » de Wim Wenders, Arisha. Le personnage de Denis Podalydès ébauché dans les films précédents, lunaire, ahuri, maladroit et pourtant subtil, généreux et intelligent, prend toute sa dimension. Non seulement un détail trivial risque de compromettre la soirée qu’un jeune Versaillais s’apprête à passer avec son invitée parisienne, mais une foule impressionnante de fâcheux envahit son appartement… Ainsi se met en place le mécanisme qui domine jusqu’ici l’œuvre encore brève de Bruno Podalydès : au cœur d’une situation banale (séduction d’un soir ou d’une vie, sait-on jamais), un détail met le héros en situation de malaise qui ne cesse de s’amplifier.
Autre moyen métrage réalisé 1994, Voilà est l’envers de Versailles Rive-Gauche. Un père, évidemment Denis Podalydès, durant quarante minutes, emmène son enfant nouveau-né partager son amour pour la nature. Idée merveilleuse, naà¯ve, bien dans l’esprit des « potes à Lydès » (titre d’un diaporama qu’ils réalisèrent au lycée). Des moments sublimes, mais une impression de longueur due à l’impossibilité d’instaurer une réelle dramaturgie, une relation entre le père et l’enfant, encore trop « chosifié ».
Les Podalydès retrouvent le ton de la comédie avec Dieu seul me voit (1998), scénario des deux frères, premier long métrage de Bruno, interprété également par Jeanne Balibar et Jean-No’ebl Brouté (le Sinclair du Mystère de la chambre jaune), et sous-titré : « Versailles-Chantiers ». Denis Podalydès interprète Albert Jeanjean, ingénieur du son incapable de résister à une jolie femme : « Quelqu’un de fondamentalement hésitant , pour qui tous les choix, même les plus anodins, seraient de véritables crève-cœur » (Bruno Podalydès). Le film est apprécié mais sous-estimé : la vogue d’un certain ton de comédie bat son plein et il souffre de la comparaison avec le film d’Arnaud Desplechin Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle), sorti peu avant.
En 1998, Liberté-Oléron vire au ton de la comédie loufoque et familiale : le personnage de père de famille interprété par Denis Podalydès entra’eene les siens dans une croisière sur un rafiot douteux fourni par le non moins douteux Chevroteau (Bruno Podalydès) : très vite, rien ne va plus. On trouve là un schéma de comédie classique dans le cinéma français : en d’autres temps, on y aurait vu De Funès, Francis Blanche, Pierre Richard… Cela n’empêche pas de Denis de composer un personnages plus que jamais à côté de ses pompes, et sa petite envie de sortir de l’ennui routinier de mener à un naufrage général qui ne menace pas seulement des vacanciers mais une famille. Une vraie famille, puisque l’on trouve dans la distribution les deux frères, le petit Jean Podalydès, et les « potes à Lydès » que sont Jean-No’ebl Brouté ou Philippe Uchan. Cette fois, Denis Podalydès en fait trop, a-t-on dit… ce n’est sans doute pas la faute de l’acteur, mais le décalage voulu entre le jeu toujours subtil de ce dernier et une situation trop classique où le spectateur attend justement non l’inattendu mais le déjà -vu…
Le passage de la comédie très personnelle, parfois familiale, à l’adaptation d’un classique du roman policier, Le Mystère de la chambre jaune, surprend. Changement de registre, de ton, de genre ? Il suffit de voir le générique et les premières images du film pour comprendre que Bruno et Denis Podalydès ont choisi, non de prendre à la légère et avec mépris le roman de Gaston Leroux et la tradition qu’il représente : c’est un certain sourire qui dominera le film, tant à travers la façon dont Denis Podalydès incarne Rouletabille que dans le choix des acteurs, en particulier Claude Rich, Michael Lonsdale, Sabine Azéma (star sans cesse absentée), un Olivier Gourmet merveilleux en vrai faux coupable, Pierre Arditi en faux ma’eetre des lieux et du jeu… Bruno Podalydès reste ici parfaitement fidèle à un exercice difficile qu’il est seul à pratiquer avec ce talent : l’art du vrai faux-pas, du juste à -peu-près…
Filmographie
- 1991 Versailles rive gauche
- 1994 Voila
- 1997 Dieu seul me voit (Versailles-chantiers)
- 2000 Liberté-Oléron
- 2002 Le Mystère de la chambre jaune
- 2005 Le Parfum de la dame en noir
- 2006 Paris je t'aime (épisode : Montmartre)
- 2008 Bancs publics (Versailles, rive droite)
- 2012 Adieu Berthe ou l'enterrement de mémé
Fiche réalisée par Joel Magny
Mise à jour le 24 octobre 2014